le 25 mars 2011
Depuis début février, j’ai complété l’étendue de mes activités. En effet, à l’occasion de mes rencontres diverses et variées…. j’ai appris qu’à la prison de Fianar, un atelier de couture vient de se mettre en place grâce à une équipe de bénévoles. Nous avons donc demandé la permission de visiter cette prison et c’est sans problème que le Père-aumônier nous a accompagnés un dimanche matin – pour la petite histoire, sachez que ce jour-là nous avons participé à deux messes: la 1ère à la paroisse (+ de 2 heures) et la suivante à la prison (1 h ½ , celle-là nous ne l’avions pas prévue !..) avec les détenus et en tant que « vazahas » nous étions même au 1er rang .
J’ai alors pris contact avec l’équipe des Laïcs Trinitaires qui ont monté ce projet. Tous les mercredis de 13h30 à 15h30, je les rejoins pour faire un peu de couture avec les volontaires tandis que quelques autres font de l’alphabétisation.
Après avoir parlé de ce travail à Pauline une jeune coopérante, elle a eu envie de faire aussi quelque chose, mais en tant qu’institutrice et ne sachant pas coudre, elle a proposé de faire de l’alphabétisation. « Pas de problème ! » le rendez-vous est fixé tous les vendredis après-midi, mais seule une personne de l’association est disponible aussi Pauline n’ayant pas envie de se retrouver seule, me demande de l’accompagner.
C’est ainsi que depuis quelques semaines, je vais deux après-midi à la prison. Les contacts sont surprenants, les femmes sont ravies de nous voir arriver, il faut dire qu’elles vivent dans une très grande promiscuité: une cour de 50m² environ, partiellement couverte où elles font leur cuisine sur leurs petits fatapera, sortes de braseros (chacune doit se débrouiller pour sa nourriture avec l’aide de sa famille), un point d’eau dans un coin leur permet de faire leur lessive avec parfois la compagnie des rats (heureusement, un trou dans le mur permet à ces hôtes indésirables de sortir rapidement), le linge sèche sur des cordes qui traversent en tous sens la cour et sous lesquels nous passons lorsque nous entrons; le dortoir est une pièce de la taille de la cour, elles sont installées sur des châlits ,les unes à côté des autres sans la moindre intimité. Cette pièce est prévue pour 35 personnes mais depuis quelques temps la population a augmenté et dans la salle à l’étage que nous occupons pour les activités, 7 femmes ont été installées en utilisant les tables comme lit – malgré tout, il faut reconnaître qu’elles ne sont pas les plus mal installées (même si les matelas sont très minces) car la pièce est plus claire et quelqu’un a apporté des petits bouquets de fleurs artificielles qui agrémentent un peu la salle. Pour terminer la description (sic!…) il faut ajouter un wc et une douche au rez de chaussée et à l’étage (ceux de l’étage sont tout à fait corrects).
Durant l’atelier-couture animée par une jeune femme qui a un BTS de couture (et qui est sans travail…), nous aidons les femmes à se confectionner une jupe et en ce moment, un pantalon. En général, elles sont plutôt volontaires lorsqu’elles sont avec nous mais il faut sans arrêt les soutenir et aussi régler les problèmes matériels – les machines souffrent car il n’y a pas de lieu de rangement !
Maintenant que je suis « formatrice en alphabétisation » je me suis plongée dans l’enseignement de base. Heureusement Pauline en tant qu’institutrice, s’occupe de l’apprentissage de l’écriture et de la lecture et moi, je la suis. Mais dans le 2ème temps, on inverse les rôles et je prends le relai pour l’apprentissage de la numération; le calcul se sera pour plus tard.
Les voir s’appliquer à former les lettres ou même simplement écrire leur prénom est impressionnant mais le plus a été la semaine dernière lorsque je leur ai fait faire un peu de repérage dans l’espace avec des flèches à suivre et des dessins quadrillés à reproduire – elles ont toutes eu plus ou moins de mal à faire ces exercices (parfois beaucoup de mal) mais ont été très fières du résultat, ce qui ne leur était peut-être pas arrivé depuis longtemps !
Nous sommes conscientes que nous leur apportons un peu d’air frais de l’extérieur, que le fait que des « vazahas » s’intéressent à elles, est très valorisant mais la volonté dont elles font preuve malgré leur situation, est une belle leçon pour nous.
Néanmoins lorsque nous voyons les conditions dans lesquelles elles vivent, nous avons beaucoup de mal à croire qu’un tel enfermement ne doit pas être qu’une punition mais qu’il doit aussi être pour toutes ces femmes, l’occasion de penser à un avenir meilleur après leur sortie – mais cela n’est que le doux rêve de mes illusions ….